[Cet article est initialement paru en décembre 2012] Alors que les virus Flame et Stuxnet sont appréhendés comme des cyberarmes qui augurent d’une cyber-guerre à venir, la question des combattants de cette guerre d’un nouveau genre n’est que très rarement posée. Elle est pourtant fondamentale. Daniel Ventre, ingénieur au CNRS et titulaire de la Chaire Cyberdéfense & Cybersécurité (Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan, Sogeti, Thalès), présente dans cet article la montée en puissance d’une nouvelle figure, celle du cyber-guerrier. Si le cyber-guerrier doit être l’acteur de la cyber-guerre, capable à la fois de défendre et attaquer dans le cyberespace, de contrer des cyber-attaques sophistiquées et de développer un cyber-arsenal, de nombreuses questions apparaissent. Y a-t-il une ou plusieurs catégories de cyber-guerriers : acteurs étatiques (militaire ou civil), non-étatiques (hackers, hacktivistes, cyber-terroristes, experts en cyber-sécurité…) ? Quelles doivent être leurs fonctions, formations, expertises ? Nombre d’Etats convoitent aujourd’hui les profils les plus pointus. L’introduction de cette nouvelle figure dans l’écosystème de sécurité/défense n’est toutefois pas sans soulever quelques difficultés. Tout d’abord parce que la ressource est rare (il s’agit de recruter les meilleurs) et que dans le même temps le besoin est énorme (les Etats- Unis l’estiment à plusieurs dizaines de milliers d’hommes, à la fois dans l’armée et dans le secteur privé) ; ensuite parce que les meilleurs cyber-guerriers seront probablement les meilleurs hackers, ce qui pose alors des questions sur la capacité des institutions à intégrer des acteurs de cultures parfois très différentes.